Actualités >

Féminisation du sport, les fédérations inégalitaires...


La sphère du sport entretiendrait-elle des rapports ambigus avec les femmes ? Si 87% des femmes de plus de 15 ans déclarent exercer au moins une activité physique ou sportive dans l'année, soit à peine moins que les hommes (91%), il reste de nombreux domaines très inégalitaires : le nombre de licenciées dans les fédérations olympiques ou celui des dirigeantes dans les fédérations.

Il y a deux ans, un rapport parlementaire fustigeait notamment le mode de gestion des fédérations, évoquant la "consanguinité" et une "inégalité persistante" entre hommes et femmes dans les instances dirigeantes. Ainsi le plan de féminisation est-il devenu pour la première fois en 2013 une pièce obligatoire de la convention d'objectifs signée entre le ministère des Sports et les fédérations sportives sur lesquelles il exerce sa tutelle.

Un an plus tard, le ministère publie un premier "Panorama sur les plans de féminisation des fédérations sportives".
Cette "photographie à un instant T" des 69 fédérations sportives qui mettent en œuvre des actions spécifiques à destination de publics féminins entend également être un outil pour l'Etat, les collectivités territoriales et les fédérations. Ainsi, son avant-propos précise que pour une collectivité, il est "un véritable instrument de travail" qui permet de "cibler les partenaires potentiels d'une politique publique de développement du sport pour tous, et/ou de recherche d'égalité réelle entre les femmes et les hommes".

La féminisation de la pratique sportive plébiscitée
Ce premier bilan a été établi à partir d'un taux de réponse de 64,5% des fédérations agréées : 22 fédérations unisports olympiques sur 31 ; 25 fédérations unisport non olympiques sur 60 ; et 22 fédérations multisports sur 25.
Parmi les axes prioritaires sur lesquels les fédérations étaient invitées à travailler, 92,8% des répondants ont déclaré s'être impliqués dans le développement de la pratique sportive pour le plus grand nombre, notamment en faveur des femmes ; 78,3% dans la féminisation des instances dirigeantes fédérales et déconcentrées ; 60,9% dans la féminisation de l'encadrement technique ; 47,8% dans la féminisation des fonctions d'arbitrages et d'encadrement ; et 55,1% dans la promotion et la réussite des femmes au plus haut niveau.

Par ailleurs, six catégories particulières de public ont été identifiées.
Il ressort de l'enquête que les plans de féminisation des fédérations ont visé le grand public dans 95,7% des cas, le public féminin issu des ZUS (17,4%) et celui issu des zones rurales (5,8%) étaient des cibles particulières, tout comme les binomes mères/enfants, notamment isolés (20,3%), le public féminin présentant un enjeu de santé (13%), les jeunes filles scolarisées (34,8%) et les femmes victimes de violences (2,9%).

Autre aspect intéressant de l'analyse des plans de féminisation : leur déclinaison territoriale.
Ainsi, 84,1% des fédérations ont prévu une telle déclinaison. L'échelon local étant privilégié (60,9% des déclinaisons), devant l'échelon régional (46,4%) et l'échelon départemental (26,1%). Par ailleurs, 40,6% des fédérations ont prévu de décliner leur plan de féminisation aux trois niveaux territoriaux.
Du point de vue de la démarche, note l'étude, 82% des fédérations ont énoncé des objectifs précis dans leur plan de féminisation, tandis que 65,2% énonçaient des indicateurs et 97,1% énonçaient des moyens.

Le football, mauvais élève de la féminisation dans les ZUS

"L'analyse générique révèle une très grande hétérogénéité des plans de féminisation, tant au niveau des avancées sur la thématique que dans la structuration et la formalisation des plans. Quand certaines fédérations sportives ont déjà une approche intégrée de l'égalité entre les femmes et les hommes dans leur fonctionnement et leur processus de décision, d'autres consacrent leur plan de féminisation à la réalisation d'un état des lieux, préalable au plan lui-même", conclut l'étude "Panorama sur les plans de féminisation des fédérations sportives".

L'enquête met par ailleurs en lumière un autre public féminin particulier des fédérations sportives, sans toutefois lui réserver d'analyse spécifique : les licenciées issues des ZUS.
Et là, les disparités sont immenses. Si dans la plupart des cas, ce chiffre oscille entre 20 et 40%, il descend à 2,9% pour le planeur ultra léger motorisé mais aussi à 3% seulement pour le football. En revanche, le taux de femmes licenciées issues des ZUS atteint 93,9% à la Fédération française d'éducation physique et de gymnastique volontaire et 81,5% à la Fédération française pour l'entraînement physique dans le monde moderne, deux fédérations dont les sièges respectifs se trouvent en proche banlieue parisienne. Faut-il y voir le résultat d'un travail spécifique de longue haleine sur le terrain ou au contraire la conséquence de la volonté du ministère des Sports de mettre l'accent depuis plusieurs années, à travers les subventions du Centre national pour le développement du sport (CNDS), sur ce public spécifique ? Cette analyse serait primordiale pour juger les politiques volontaristes actuellement mises en œuvre.

Quant à une éventuelle féminisation des instances dirigeantes, elle ne pourra pas intervenir avant la saison 2016/17, année de renouvellement des mandats électifs dans les fédérations olympiques.

Jean Damien Lesay


Pour en savoir plus,

Télécharger le plan de féminisation des fédérations

Source : Localtis